Au cours de la manifestation “Monstration” du dimanche 24 janvier, entre la place Arnaud Bernard et le Monument aux Morts, ce sont plusieurs générations d’ami.e.s de Mix’Art Myrys qui ont tenu, par leur présence, leurs chants, leurs danses, à affirmer l’importance que revêt à leurs yeux ce fleuron de la culture indépendante.

Reportage audio sur le grand boulevard, ce dimanche 24/01/2021 | Montage Fred Ortuño

Beaucoup ont découvert cet espace atypique et ses artistes lors de l’occupation de l’ancienne Préfecture, rue de Metz (entre 2001 et 2005). La plupart semblent avoir alors été mordus par ce “dragon” irrésistible. A l’image de Sandro, ingénieur en aéronautique :

“J’aime beaucoup cette proposition de culture. Depuis la rue de Metz, je passais par hasard, je suis rentré dans ce bâtiment avec des vitrines décorées. J’ai demandé ce que c’était. A ce moment là, il y avait un accueil en haut des escaliers, on m’avait expliqué… Plein d’ateliers étaient proposés. J’avais pris des cours de djembé.”

Sandro, interrogé pendant la manifestation du 24 janvier 2021

Salomé, elle, se souvient d’une soirée d’un festival électro mémorable qu’elle avait passée à découvrir le scratch. De retour depuis une petite année à Toulouse, elle ajoute : “J’adore cette ville, je n’ai pas envie que tout ça disparaisse. Je ne suis pas d’accord avec ce chemin que prend la Ville de Toulouse”.

J’ai peur qu’on perde cet endroit. Plein d’amis ont travaillé là bas. Je suis jongleur. Je trouve ça super cool, énorme.

Namer, Jongleur israëlo-Palestinien

Lieu unique, cultivant l’éclectisme des disciplines et des genres très peu défendus ailleurs (rock, ska-punk, techno, électro, hip-hop, rap…) Mix’Art Myrys, on le voit bien en interrogeant les un.e.s et les autres, sait aussi se mettre au service de causes les plus diverses, en travaillant cette singularité du lieu et du lien avec chacune des organisations, des collectifs qui y ont organisé des événements. D’ailleurs, beaucoup sont aussi là pour saluer l’histoire, cet indéfectible lien à la ville avec ses acteurs “alternatifs”, que le Collectif d’artistes autogéré a su nouer et entretenir au fil de ces vingt-cinq ans d’expérimentations.

Mix’Art, c’est des copains, des amis, des militants de la culture avec lesquels on marche depuis plus d’un vingtaine d’années. Ce qui se passe n’est pas normal, c’est un scandale. On nous réduit nos libertés, nos envies de culture, de rencontres, de se mélanger, de faire humanité. Je suis ravi de voir tout ce monde. Mix’Art devient un espèce d’étendard de la colère, de la culture, de la liberté. Je les invite à renouveler cette opération qui me rappelle la Mascarade que nous organisions il y a vingt ans quasiment jour pour jour.

Tayeb, militant des quartiers populaires au Nord de la Ville

L’histoire collective s’écrit depuis les expériences individuelles. Là encore, 25 ans ne peuvent s’effacer en un tour de vis des services de sécurité de la Ville. Pour Joachim, comédien, qui a découvert le collectif lorsqu’il était ado, qui y a ensuite travaillé, répété, “Mix’Art Myrys est structurant pour l’âme toulousaine”. Et de préciser : “Des milliers de gens ont fait leur éducation à l’art et à la citoyenneté à cet endroit là. On ne peut pas laisser toute la ville à la spéculation immobilière et aux activités normées.”

Le contexte local et national s’invitent dans le défilé toulousain à chaque instant. Il ne saurait en être autrement. Tant pour Djamal qui insiste sur le fait qu’on a besoin “de ces espaces dans une société qui ne produit plus de sens si ce n’est le matériel, la surconsommation”, que pour Mélanie, “dans la période liberticide qu’on est en train de vivre, c’est important, c’est une soupape indispensable.”

Cette ville est à nous, et nous, ce ne sont pas 3 babas cools aux cheveux dans le vent qui boivent de la bière et crachent du feu. Que la Mairie se méfie des raccourcis !

Mélanie, chargé de mission culture pour l’éducation populaire

Pour ne pas devenir un pays-Ephad, comme le préconisait un manifestant, il faut continuer ce combat, défendre ce commun(s). L’un des textes lus depuis la camion plateau par Sabrina, membre de la collégiale, offrait une belle conclusion : “à la fin des fins, restera l’indestructible, le trop léger pour mourir. Vous et nous ensemble.”